25 avril 2024

Bilan du rôle de garants autour du projet Esplanade

Rappel du contexte :

Des grenoblois se sont penchés depuis bien des années sur la mutation de cet ancien faubourg qui a vu en son cœur, la grande Esplanade, de multiples activités au fil du temps. La foire des Rameaux y est accueillie depuis 1934.

En 2009, en accompagnement de la création de la ligne E du tramway qui traverse désormais le site, un processus de renouvellement urbain de l’Esplanade est engagé. La municipalité créé une ZAC et confie l’aménagement à Christian de Portzamparc.

Par délibération 25 juin 2012, la Ville de Grenoble procède à une révision du PLU

Le tribunal administratif de Grenoble annulera le 17 décembre 2013 la délibération du 25 juin 2012 du conseil municipal de Grenoble approuvant la révision simplifiée du plan local d’urbanisme pour le secteur Esplanade.

Cette annulation bloque le projet sur l’Esplanade.

D’avril 2012 à juin 2013, l’association « Vivre à Grenoble »  propose une pétition à la signature pour refuser ce projet de ZAC Esplanade (20.000 signataires dont 10.000 grenoblois).

Selon les règles de la municipalité en place à ce moment, un débat se tient le 17 juin 2013 lors d’un Conseil Municipal extraordinaire au cours duquel l’association  demande la tenue d’un référendum, ou d’un moratoire dans l’attente des prochaines élections municipales de mars 2014. Le maire ne répond pas favorablement à cette demande poursuit son projet.

Vivre à Grenoble a par la suite interpellé les candidats pour connaître leur position sur deux points, la volonté de ne rien construire dans le cœur historique de l’Esplanade et le volume de construction annuel envisagé.

Pendant sa campagne électorale, la liste “Grenoble, Une Ville pour tous” a diffusé ses douze propositions pour l’Esplanade.

Une fois élue, cette liste procède à la suppression de la ZAC par délibération du 30 juin 2014, délibération dans laquelle nous retrouvons les intentions de la nouvelle majorité pour le site de l’Esplanade.

Le 12 juillet 2016, une délibération est prise qui fixe les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation préalable à la définition du plan guide de réaménagement du quartier de l’Esplanade.

Une co-construction est lancée avec des aspects “non discutables”, les invariants, qui sont énoncés dans la délibération :

  • Maintien de l’espace public au cœur de la grande esplanade, réduisant ainsi le programme de construction de l’opération et confirmant sa vocation historique d’accueil évènementiel.
  • Pacification de la RN481 et la Porte de France
  • Renforcement des trames bleues et vertes de l’agglomération.
  • Construction d’immeubles neufs comprenant notamment du logement social et de l’accession sociale dans les secteurs actuellement urbanisés du quartier
  • Favoriser la réhabilitation des immeubles existants
  • Insérer les nouvelles constructions dans le paysage urbain existant
  • Créer une passerelle sur l’Isère réservée aux piétons et aux cycles
  • Valoriser et développer l’artisanat, le commerce et les services
  • Réduire le stationnement sur la grande Esplanade

Le périmètre étudié pour le projet représente 21 ha et va de la Porte de France à la limite de St Martin le Vinoux, et des berges de l’Isère aux coteaux habités en contrebas de la Bastille.

L’équipe de co-construction est pilotée par l’agence HDZ Urbanistes Architectes.

Les outils déployés par le groupement sont les suivants :

  • Des ateliers et présentations publiques
  • Une permanence hebdomadaire à la Maison du projet
  • La tournée du triporteur
  • Un site internet
  • Des groupes de travail de trois types, correspondant à trois niveaux d’impact.
    • Un à l’échelle du quartier regroupant des citoyens et acteurs du quartier
    • Un autre l’échelle de la ville et de la Métropole permettant d’aborder la question du devenir de ce quartier au regard de problématiques élargies
    • Un autre associant des experts (universitaires, institutionnels) pour apporter un éclairage alternatif aux réflexions des acteurs locaux

Le groupe de travail « proximité » rassemble les associations d’habitants et de commerçants pour qui l’Esplanade est avant tout un espace de vie quotidienne (AARE, UCPE, AHQE, La Casamaures).

Le groupe de travail « Ville et Métropole » rassemble des associations s’inscrivant dans une échelle plus vaste que le quartier : trames vertes et bleue, déplacements, culture et événements…(ADTC, UHCV, UQRD, Alpes Solidaires, Vivre à Grenoble, Patrimoine et Développement).

Le groupe de travail « Professionnels et experts » associe des personnalités issues de monde universitaire et des institutions publiques pour apporter un regard prospectif sur le projet d’aménagement (CAUE, ENSAG, MA 38, AURG).

Le rôle tenu par des membres des CCI est spécifié dans la délibération.

Rôle des CCI
Extrait de la délibération

 

 

 

 

 

Retour d’expérience des membres CCI

Anne et Florian, qui ont participé à la démarche depuis son lancement livrent ici leur retour d’expérience sur la démarche, sur ce qui a bien fonctionné, leurs regrets et des pistes d’amélioration du processus de co-construction et sur l’évolution du rôle de garants qui leur a été confié.

Sur la méthode générale :

Il nous semble vraiment regrettable de ne pas avoir été associés plus en amont à la mise en place du processus de co-construction, à la définition des acteurs et des outils, à une grille d’évaluation à venir. Travailler sur le cahier des charges nous aurait paru être une belle avancée dans le cadre du développement de la démocratie participative.

Nous regrettons également de ne pas avoir été associés à certains échanges, notamment avec les forains, autour des enjeux de la grande Esplanade, avec le gérant d’Intermarché, détenteur d’un tènement majeur du site et acteur économique central du quartier, avec l’entreprise Vicat, propriétaire foncier important et maître d’ouvrage potentiel d’un équipement culturel et touristique thématique sur le ciment, avec la commune de Saint Martin le Vinoux, qui partage les enjeux du quartier, avec les services métropolitains, dans le cadre du projet de trame paysagère Mikado dont le quartier constituera un maillon, avec les commissions techniques Ville de Grenoble, où le projet Esplanade est développé en dehors des instances de participation. Nous sommes bien conscients que certains temps de “négociations” ne peuvent nous être ouverts mais certains enjeux sont restés hors de notre portée sans ces échanges.

Nous nous sommes demandé comment étaient constitués les GT

Les Groupes de Travail sont une instance importante de la co-construction, ils visent à alimenter le projet sur le fond. Toutefois, il ne s’agit pas d’une instance de co-décision : les décisions finales appartiennent aux élus dans le cadre du comité de pilotage.

  • Qui a fixé la liste des associations susceptibles de participer aux Groupes de Travail ?
  • Pourquoi une présence directe des Groupes de Travail en comité de pilotage n’est-elle pas prévue ?
  • Pourquoi ne pas avoir hiérarchisé l’importance des groupes de travail ?
  • Les riverains ne devraient-ils pas avoir une importance plus grande que les autres dans le processus ?

Suite à une demande des participants et des CCI, le Groupe Experts a pu être consulté en premier durant la phase Plan-guide, permettant d’apporter son éclairage en amont aux autre participants.
Le Groupe Ville et Métropole a poursuivi ses travaux tout au long de la démarche. Une structure associative y a été représentée un temps par un habitant qui n’était pas dument mandaté par la structure. Les membres des CCI l’ont indiqué à l’équipe HDZ qui venait d’en être avisé par la structure. Le Groupe Proximité ne s’est pas réuni en phase Plan-guide, interrompu par l’abandon de certaines structures

Méthode de travail en GT

L’ordre du jour des groupes de travail n’a pas laissé de place pour des propositions, il s’agissait uniquement d’évaluer, de prioriser, de débattre des propositions émanant de l’équipe HDZ, de travailler en groupe selon les modalités définies par l’organisateur.
Cela a fait l’objet de critiques plus ou moins vives de certains participants lors des temps de concertation. Les membres des CCI le regrettent également mais n’ont en aucun cas été associés à cette décision.

En particulier, la maquette a été conçue comme un support de représentation pour les scénarios, et non comme un outil de travail collaboratif, en partant d’une maquette vide ou simplement alimentée par le diagnostic.

Rythmes des Groupes de Travail

Le rythme des groupes de travail nous a paru satisfaisant, mais il aurait été plus facile à tenir si davantage de membres des CCI avaient été impliqués.
Mais n’auraient-ils pas été plus impliqués si les CCI avaient été associés à la construction de la démarche plus en amont ?

Communication

Au lancement de la démarche, les membres des CCI ont reçu de façon systématique les documents mis en partage sur le site dédié à la démarche de co-construction. Parallèlement, afin de vérifier son fonctionnement, ils se sont inscrits sur la lettre de diffusion du site. ans un premier temps,  diffusion systématique des documents postés sur le site. A posteriori et au regard de la quantité de documents disponibles sur le site à ce jour, il semble que les alertes de publication n’aient pas bien fonctionnées.

Les réunions publiques ont été bien organisées, et l’équipe HDZ claire et complète dans ses propos, l’annonce de ces réunions est restée assez confidentielle.

Sur les outils utilisés, il nous a semblé que HDZ proposait des supports de qualité, même si certains visuels n’étaient pas toujours à jour (ex : “mauvaise” hypothèse porte de France sur les derniers visuels  du Plan-guide).

Mais la conduite du projet nous a semblé globalement mal accompagnée en termes de communication.

La déconnexion des interventions des élus dans la presse d’avec le processus de co-construction et ses acteurs a posé problème, lors de la dernière réunion publique au Boulodrome. Nous aurions aimé être avisés de cette interview d’autant plus qu’elle a perturbé la réunion publique. A ce jour, le contenu de cette interview ne n nous a pas été communiqué. Nous l’avons déploré lors d’échanges avec le chargé de projet de la Ville et auprès des équipes de HDZ qui ont semblé ne pas avoir été informés non plus. Ce défaut de communication alimente le sentiment que la co-construction serait vaine.

Comité de pilotage

Les invitations aux comités de pilotage ont été tardives pour les membres des CCI, nous avons eu le sentiment d’être presque oubliés. A ce jour, nous attendons encore le compte rendu du dernier comité de pilotage du 24 novembre 2017.

Nous aurions apprécié avoir connaissance au préalable de la liste des invités, de manière à nous faire expliquer certains choix. Nous regrettons les prises de décisions lors du dernier Copil, non pas dans leur contenu, mais dans leur forme. Certains élus étaient attendus par ailleurs en fin de réunion et les votes se sont fait “au pas de course” nous laissant un sentiment de prise de décision bâclée ou de simple chambre d’enregistrement de décisions déjà actées.

Sur le contenu des échanges et leur prise en compte

Un changement tardif de point structurant du projet, comme la polarité commerciale liée à l’Intermarché qui passe du nord au sud entre le dernier scénario retenu et le plan-guide, est dommageable à la démarche.

On peut imaginer que les échanges en groupe de travail auraient été différemment orientés si cette décision avait été annoncée plus tôt.

Ce n’est pas parce que l’équipement structurant proposé en phase scénarios, tel que dessiné et programmé, n’a pas été retenu, qu’aucun équipement structurant ne serait souhaitable sur le quartier.
Il n’est pas certain que le parc des berges puisse en tenir lieu. La grande Esplanade pourrait le devenir selon sa programmation.

Quid de la porte de France, dont le bâtiment et le parvis occupent une place stratégique à l’échelle de l’agglomération ?

Quid du patrimoine Vicat, pour lequel une idée de valorisation a été émise, mais qui n’a pas de forme à ce jour ?

Faisabilité

Il nous semble que certains aspects de la faisabilité technique du projet restent encore flous à ce stade, leurs conséquences pourraient remettre en cause les options validées :

  • Quelle faisabilité pour un engazonnement renforcé de l’Esplanade, support des événementiels ?
  • Quelles implications techniques et calendaires pour le déclassement de la RN ?
  • Nous avons également été surpris d’apprendre que la passerelle prévue de longue date dans le projet ne figurait pas au Plan Pluriannuel d’Investissement métropolitain. Nous ne savons pas évaluer dans quelle mesure ce document peut être révisé.
Logement

Un fort accent sur la nécessaire réhabilitation de l’existant figure dans les invariants. Ce point a été si peu évoqué lors de la démarche de co-construction que nombre d’habitants et d’associations impliqués se demandent aujourd’hui si ce point n’a pas été oublié.

Pas de réponse méthodologique et de contenu sur le logement. Les experts ont insisté sur la notion de “manière d’habiter”, sur l’échelle des parcelles et des îlots, ces aspects nous paraissaient essentiels mais nous avons le sentiments que des considérations de rendement ont pris le pas sur ces aspects.

Atouts de la présence de membres des CCI dans la démarche
  • Notre présence bouscule les habitudes de travail des élus et techniciens en les obligeant à sortir de réflexes trop normatifs et à avoir un regard plus large, susceptible d’obtenir une meilleure compréhension et adhésion par les habitants.
  • La relecture et l’enrichissement des compte rendus contribue à mettre le focus sur des points d’alerte
Regrets
  • A notre sens, il manque une attention sur les usages en cours de projet (espaces verts, vélo, animation commerciale, etc).
  • L’enquête déplacements ( Metro) a fait l’objet d’une annonce floue (calendrier) puis intégrée aux documents sans être présentée ni diffusée.
  • En plus des invariants politiques, des invariants techniques et des contraintes d’acteurs (Intermarché) ont entravé la créativité autour du projet de réaménagement du quartier de l’Esplanade.
  • Il est important, maintenant que le processus de co-construction de cette phase touche à sa fin, d’évaluer la présence des CCI dans le dispositif. Ce travail est rendu difficile par l’absence d’une grille d’évaluation qui aurait été définie en amont du projet. A l’avenir, la définition d’une telle grille d’évaluation sera indispensable, afin de mieux rendre compte à l’issue des projets en co-construction, mais aussi en cours de travail.
Voici d’ores et déjà quelques suggestions d’évolution

Nous avons pu nous mobiliser pour répondre à la proposition qui nous a été faite. Il aurait été souhaitable que nous soyons plus nombreux, et d’autant plus à l’avenir si l’on veut renforcer cette implication dans les démarches de co-construction. Cette mobilisation plus large serait rendue possible si nous étions plus associés à la définition du processus.

Avec des observateurs citoyens plus nombreux, il serait intéressant sur un futur projet de constituer une équipe qui se réunirait aussi en-dehors des temps de concertation, pour mettre en commun l’expérience de chacun, faire une évaluation en continu, proposer des améliorations en cours de projet, communiquer en direction des autres citoyens grenoblois…

Pour assurer une présence citoyenne plus ancrée et mieux comprise, nous proposons :

  • Associer les CCI à l’élaboration de la méthode de co-construction
  • Associer les CCI à la composition des groupes de travail, éventuellement interagir avec les instances invitées en amont
  • A l’issue de chaque groupe de travail, formuler un “rapport d’étonnement” sur comment nous avons perçu la séance en tant qu’observateurs

Le comptes-rendus des groupes de travail, dont nous étions contributeurs / relecteurs, étaient plutôt bien faits et conformes aux échanges. Leur mise au point souffrait parfois d’inerties (responsabilité partagée), c’est pourquoi nous proposons :

  • Qu’en plus des dates d’ateliers, on détermine à l’avance le calendrier de relecture et diffusions des CR
  • Qu’ils soient créés comme des documents collaboratifs pour en faciliter la rédaction et la relecture

Nous comprenons la volonté des élus de rester en retrait des moments de co-construction, pour ne pas “interférer”. Mais cette distance est très préjudiciable quand une prise de parole de leur part n’est pas coordonnée avec la dynamique de co-construction. Cela donne l’impression qu’il y a d’un côté les acteurs de la co-construction, et de l’autre les élus qui suivent leur propre dynamique indépendamment.

  • Il nous semble qu’une présence des élus pendant certains temps de travail, sur un mode non interventionniste, leur permettrait d’une part de ressentir l’ambiance et la dynamique du projet, et d’autre part de rendre manifeste la cohérence générale de la démarche aux yeux des participants et des habitants.

Parmi les élus concernés, ceux de l’Urbanisme, des secteurs, de la Voirie (Métro), de la nature en ville…

Points de vue entendus, minoritaires et non retenus dans la concertation
  • Ne pas se limiter à une passerelle piétonne, et créer un véritable pont.
  • Ne pas construire sur la petite Esplanade
  • Densité de logements trop importante
  • Réduction du volume de stationnement trop importante
  • Les flux et la capacité à stationner facilement sont générateurs d’activité commerciale pour le quartier.
  • La foire des rameaux est pour l’ensemble des participants une source importante de nuisances qui perturbe le fonctionnement du quartier (bruit, baisse de la fréquentation des commerces, bouleversement du stationnement). Il s’agit également d’une forte contrainte sur le projet urbain qui interdit à la fois la construction et l’aménagement d’espaces paysagers et de mobilier urbain sur la grande Esplanade.
  • Pas assez de place à la rénovation de l’existant.

Plus d’infos sur la page dédiée sur le site de la Ville de Grenoble et sur le site dédié au projet.

Une réunion publique s’est tenue en mairie le 06 mars 2018. Un document de support de présentation du plan guide a été projeté. Vous pouvez le retrouver ici

Article rédigé par Anne Saoudi et Florian Arthus

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